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27 février 2020
đ Cali, Colombie đšđŽ
ArrivĂ© Ă Cali depuis la veille, toujours en compagnie dâEmilie qui voyage avec moi depuis plusieurs jours, nous sommes posĂ©s Ă lâauberge, en attente du bus qui va nous emmener Ă Medellin. Il est 20h environ, le bus nous attend Ă 22h.
Je suis allongĂ© dans un canapĂ©, je trie mes photos, publie celles de la veille, et laisse filer le temps, emmagasinant un peu dâĂ©nergie avant les dix heures de bus qui nous attendent.
21h, il est temps de quitter lâauberge pour rejoindre le terminale de bus. Je sors du canapĂ©, rĂ©cupĂšre mes lunettes de soleil et mon appareil photo, les remets dans mon sac et rejoint Emilie qui mâattend Ă la rĂ©ception. Cinq minutes plus tard le taxi est lĂ , nous nous engouffrons dedans, et nous voilĂ parti pour quinze minutes dans la circulation dense de Cali. Nous sommes heureux dâavoir pu dĂ©couvrir cette ville animĂ©e et dansante, tout autant que de retourner Ă Medellin.
Un quart dâheure plus tard le taxi pĂ©nĂštre dans le couloir du terminale qui lui est rĂ©servĂ©, le montant de la course sâaffiche, jâouvre mon sac Ă dos pour en sortir la pochette dans laquelle se trouve ma monnaie, et lĂ , je vis lâun de ces moments que chacun de nous a connu au moins une fois dans sa vie. Mon sac est rempli de choses en tout genre, mais jâai beau les secouer, les retourner, glisser ma main dans le moindre interstice, ma pochette semble en ĂȘtre absente. Emilie paye, nous quittons le taxi, je pose mes deux sacs et vĂ©rifie une fois encore, en le vidant cette fois, mais rien ! Ma pochette nâest pas lĂ .
Saint Graal
Deux options. Je suis certain de lâavoir utilisĂ© vers 19h pour payer le verre que nous avons partagĂ© au bar avec Emilie. Le bar est Ă quelques minutes Ă pied de lâauberge. Soit ma pochette est perdue quelque part entre le bar et lâauberge. Soit elle est dans le canapĂ©, abandonnĂ©e Ă un sort que jâenvisage dĂ©jĂ dĂ©sastreux. Il faut agir vite, je nâai quâune chose Ă faire, prendre un taxi pour retourner Ă lâauberge. Je laisse Ă Emilie mes deux sacs, elle me donne la monnaie quâelle a dans la poche pour que je puisse payer le taxi, et me voilĂ parti. Ă cet instant, je suis dans un Ă©tat proche de la panique. Car, prĂ©cision importante, cette pochette contient environ 200 000 pesos Colombien, ce qui ne fait jamais que 55âŹ, autant dire que si ils nây sont plus, ça ne sera pas bien grave, mais en plus de ces quelques billets, cette pochette contient mes cartes bleues – il y en a trois, et je me vois dĂ©jĂ me retourner la tĂȘte pour rĂ©aliser les procĂ©dures dâopposition – et aussi et surtout le Saint Graal pour moi qui suis Ă des milliers de kilomĂštres de chez moi, et censĂ© prendre mon prochain avion dans trois jours⊠mon passeport.
GTA
Les quinze minutes qui me sĂ©parent de lâauberge semblent durer chacune une demi heure. Il y a encore plus de voitures quâĂ lâaller, et ma tĂȘte fume, les rĂ©flexions sâentrechoquent, partagĂ© entre la peur dâarriver au terminale de bus aprĂšs 22h, de rater le bus, mais aussi dâentrainer Emilie dans ma chute, et la perspective effrayante de ne pas retrouver ma pochette, mâassurant quelques jours (quelques semaines ?) bien compliquĂ©es. Heureusement le taxi se comporte comme si il Ă©tait en train de jouer Ă GTA, dâhabitude cela mâaurait angoissĂ©, mais Ă ce moment lĂ jâen suis le plus heureux du monde. La route dĂ©file, les minutes sâĂ©grainent, il est environ 20h30 quand jâarrive Ă lâauberge, et jâai juste le temps de me dire que, si ma pochette est bien lĂ , je serai dans les temps pour le bus.
Champion’s League
Je demande au chauffeur de mâattendre, quitte le taxi en trombe, et cours jusquâau jardin dans lequel se trouve le canapĂ©. Jây aperçois un couple affalĂ©, ils me regardent un peu effrayĂ©s – mon visage doit traduire Ă lui seul lâĂ©tat dans lequel je suis – jâentame une phrase en anglais pour leur demander si ils nâont pas trouvĂ© un objet qui ressemble à ⊠et tout en mâadressant Ă eux, comprenant que ma pochette nâest pas sur le canapĂ©, je baisse les yeux sur le sol pour essayer de lâapercevoir. Je nâai pas le temps dâachever ma phrase, dans la pĂ©nombre de ce coin du jardin mal Ă©clairĂ©, je devine, abandonnĂ©e sur le sol, ce qui soudain prend pour moi les traits du trophĂ©e de la ligue des champions, voire mĂȘme du trĂ©sor de Rackam le Rouge. JâachĂšve ma phrase avec un « qui ressemble à ça » de soulagement. Nous Ă©changeons des rires, je les sens soulagĂ©s eux aussi, je leur dis au revoir et regagne le taxi en courant. Nous repartons en direction du terminale, Ă ce moment lĂ je sais que seule une panne ou un accident mâempĂȘchera de prendre le bus. Quâimporte, si câest le cas je prendrai le suivant, mes cartes bleues et mon passeport en poche. Pas dâembuche, jâarrive au terminale Ă 21h43, Emilie mâattend, et lit dans mes yeux mon soulagement, Medellin nous voilĂ âŠ